C’est par un exercice de clarification conceptuelle, afin d’éviter toute amalgame, entre l’esclavage occidental et celui en vigueur dans les sociétés negro- africaines, notamment Soninké, que Baliou Mamayary Coulibaly s’est attelé dès l’entame de son intervention à l’occasion de l’atelier de sensibilisation sur l’esclavage, organisé par Ganbanaxu, le dimanche, 08 septembre 2024 à Nouakchott.
Le conférencier a relevé qu’on parle souvent de séquelles de l’esclavage qui seraient des pratiques résiduelles de l’esclavage. M. Coulibaly a noté que les séquelles sont deux natures : physiques, morales, psychologiques, et peuvent même être sources de stigmatisation sociale. Cependant, il démontre que les séquelles physiques (la maltraitance) peuvent disparaitre avec le temps. En revanche, celles liées à l’esclavage sous le voile de la culture, sont plus insidieuses et marquent les victimes à vie et même au-delà.
Et le militant des droits de l’homme d’expliquer brillamment que l’esclavage tel que défini par les Nations Unies n’existe presque plus dans les communautés negro africaines, notamment Soninké, Pulaar et Wolof de Mauritanie.
Poursuivant sa démonstration argumentative, faite de comparaison entre l’esclavage au sens conventionnel et celui dit par ascendance, M. Coulibaly a expliqué, que l’esclavage occidental s’applique à un individu, et ce en dehors de toutes considérations liées à l’origine sociale. Ainsi toute personne peut être réduite en esclavage, mais une situation qui peut s’estomper dès que les conditions de la victime venaient à changer.
Contrairement, l’esclavage occidental, l’esclavage traditionnel ou par ascendance est héréditaire, et s’applique à l’individu sur la base de son origine sociale, un statut lié à un patronyme a rappelé le conférencier. Dans ce cas d’esclavage traditionnel, l’esclavage commence avant la naissance et continue toute la vie, et même après la mort.
Pour illustrer ses propos, M. Coulibaly a indiqué que chez les soninké, on est esclave avant la naissance et on continue de l’être même après la mort : les anecdotes ne manquent pas, faisant allusion sans le dire clairement, aux quartiers des esclaves, mosquées pour esclaves et même des cimetières pour les esclaves.
Le militants anti esclavagiste va plus loin dans son réquisitoire, en précisant que le concept de « séquelles » de l’esclavage n’est approprié que dans le cas de l’esclavage physique, dans la mesure où on peut envisager la fin des mauvais traitements physiques.
A contrario, a dit le conférencier, l’esclavage traditionnel est sans fin ; on ne peut lui attribuer des séquelles, dans la mesure où, il n’a pas encore disparu. Il existe dans les mentalités et dans les pratiques.
Pour prouver l’existence de l’esclavage par ascendance en milieu Soninké, M.Coulibaly a souligné qu’il fut un temps où les lobbies suprématistes Soninké étaient dans le déni. Aujourd’hui, ils se vantent d’être « propriétaires d’esclaves », en revendiquant haut et fort leur statut, en disant qu’ils sont différents des autres « horon ndo inta baana ». Ils soutiennent et financent les groupes terroristes pour maintenir les esclaves dans leur statut d’esclave.
Baliou Mamayary Coulibaly a également évoqué les différentes pressions que subissent les descendants d’esclaves dans la communauté soninké, notamment ceux de « Ganbane« , les abolitionnistes ayant refusé leur statut d’esclave. Ces Privations ou pressions se manifestent de plusieurs manières, selon le conférencier : interdiction d’accès au puits du village, à la terre et même le lynchage etc.
Seyré SIDIBE