Le Calame – « Jeunes de tout le pays, mariez-vous ! » Dans un élan de compassion avec les plus démunis dont il gardait jalousement le secret, notre patronat propose qu’aucune dot de mariage ne dépasse plus 5000 MRU.
Dans le but, selon lui, de mettre cette union sacrée à la portée de tous et d’éviter en conséquence les manifestations ostentatoires de gaspillage. Une charte a même été édictée en ce sens. Pour joindre l’acte à la parole, le président de ce qui s’apparente à un club de nouveaux riches – pour ne pas dire « anciens pauvres », comme les surnomme l’humoriste franco-marocain Ghad El Maleh – a décidé de parrainer le mariage de cinquante couples et d’offrir à chacun un million MRO pour commencer leur nouvelle vie.
Sans préciser sur quels critères seront-ils choisis, ni l’origine des fonds ni sous quel « haut patronage » la célébration commune sera-t-elle organisée. Faut-il l’applaudir l’initiative, en rire ou en pleurer ?
Le problème de notre jeunesse se résume donc, selon notre patronat éclairé, aux difficultés de se marier. Certes, à chacun ses soucis. Tout comme les problèmes du peuple se limitent, selon notre gouvernement, au ciment et au poulet.
Enfin, bref… Si l’on écarte l’effet d’annonce, que restera-t-il de ces mesures ? De la poudre aux yeux, très certainement.
Le patronat devrait commencer par une « charte de vertu », en vertu de laquelle il ne trichera plus lorsqu’un de ses membres gagne un marché public ; fixer une marge bénéficiaire raisonnable pour les produits de première nécessité ; ne plus importer des médicaments et autres produits périmés ; payer les impôts en déclarant les vrais bilans de leurs entreprises, donner plus de chances aux jeunes lors des recrutements, etc. : la liste des manquements pénibles est extensible à l’infini.
Charte du « patron-modèle » ? De quoi s’ériger alors en donneurs de leçons, ainsi qu’en avait donné l’exemple sa mouture du début des années 2000 alors sous la présidence de Mohamed Bouamatou, qui avait décidé de recruter quatre mille diplômés-chômeurs. Un succès notoire. Est-il ici nécessaire de souligner que c’est plutôt de ce genre d’initiatives dont on a besoin ?
Ahmed ould Cheikh