Le Calame – La réélection de Mohamed ould Ghazouani à la tête apparente du pouvoir pose diverses questions. La première est assez ambigüe : de quel système notre Président est-il le produit ?
De celui des classes traditionnelles, très certainement, et ce n’est pas pour rien qu’on lui a attribué le surnom de « Président-marabout »… Mais avec quelles accointances avec la domination des militaires aux commandes du pays depuis 1978 ? Et, surtout, avec ce qu’implique d’injustices sociales et environnementales l’organisation moderne de la Marchandise et de son spectacle ?
Cette réélection a révélé une fracture – pour ne pas dire béance… – entre une Mauritanie des privilèges qui s’y est investie à fond pour assurer la pérennité de ses intérêts et une Mauritanie de base, celle des déshérités, des pauvres, des jeunes sans perspectives et en perte de repères…
Il y a comme une antinomie entre notre ancestrale gestion de la pénurie et l’outrance contemporaine de la consommation. C’est un risque grandissant de conflits sociaux. À cet égard et qu’on le veuille ou non, Ghazouani est perçu aujourd’hui comme le garant des intérêts des puissants, des nantis et des moufsidines.
À l’ombre de ses 56%, il y a beaucoup de désillusion et de désenchantement, de désespoir et de ressentiment. Élu grâce à l’influence des notables et au poids de l’argent, peut-il s’émanciper des faucons de son régime ? A-t-il les moyens – une vraie volonté même ? – de reconquérir la confiance du peuple ? Les beaux discours ne suffisent pas et suffiront de moins en moins.
À défaut d’actes décisifs, de capacité réelle à détricoter le système bancal qui nous domine, ce nouveau quinquennat devrait à tout le moins poser les conditions de bien plus qu’une alternance : une réelle alternative. En tendant notamment la main à l’opposition radicale… Il en va de l’intérêt et de la stabilité du pays.
Ahmed ould Cheikh