Une campagne électorale inédite

Une campagne électorale inédite

Cette campagne électorale va prendre fin et certaines observations s’imposent. D’abord jamais une campagne officielle na été précédée d’une officieuse malgré les textes, une campagne qui a duré plusieurs mois. Jamais avant cette campagne un conseil constitutionnel n’a été investi par des forces de l’ordre chargées de faire taire un candidat devant les sollicitations de la presse.

Jamais des candidats ne se sont vus refuser des parrainages sur injonction flagrante des pouvoirs publics. Jamais la Ceni na été aussi sénile et contestée. Jamais auparavant un candidat ne s’est vu empêché de tenir un meeting au prétexte que cela coïncide dans le timing ou dans le choix du lieu avec la programmation du candidat du pouvoir. Jamais un candidat du pouvoir ne s’est vu autant hué par les populations. Jamais des familles soufies n’ont autant eu pignon sur rue.

Jamais les programmes n’ont été aussi faibles et flous, jamais le bilan sur lequel s’est fondé le plaidoyer du Président sortant et candidat n’a été aussi mitigé et contesté….

Pour la première fois de l’histoire du pays des incidents ont été l’occasion de voir des jeunes du peuple investir un meeting de l’un des directeurs de campagne du candidat au pouvoir et de le chasser des lieux manu militari.

Jamais la vindicte populaire conséquence d’un ras le bol généralisé et abyssal de tous les desperados et indignés n’a été autant ressentie et extériorisée avec véhémence ..Jamais un candidat du pouvoir n’a été si approximatif dans ses sorties face aux populations et aux médias. ..Son image en a été très entamée….C’est à croire qu’il n’est pas entouré et encadré par des conseillers à la hauteur de leur tâche…..

Pour la première fois dans l’histoire politique du pays, un activiste, homme politique, courageux, téméraire et ambitieux qui a surfé habilement sur la vague de la lutte contre l’esclavage et qui fait peur à l’establishment beydane se sent si proche du pouvoir…Mal aimé et craint par la nomenklatura des cols blancs, honni par certains milieux religieux et traditionnels, il a su jouer le jeu des différents pouvoirs militaro-feodalo- ploutocrates pour se maintenir et poursuivre son ascension politique.

Aujourd’hui à la faveur d’une jonction et d’une accumulation des désespoirs et désarrois qui ont atteint en masse toutes les composantes du pays sans distinction, en raison des politiques de gestion économique et sociale désastreuses, depuis quarante ans, le voilà qui s’érige seul et sans concurrent comme l’espoir de la lutte des classes, le salvateur possible d’un peuple meurtri par les inégalités.

Il profite de l’erreur fatale de la recherche insensée du consensus de Ghazouani qui a non seulement détruit la démocratie mauritanienne mais a laissé un boulevard immense de solitude et d’errance politique pour des milliers de militants de partis fondateurs de la démocratie, dont les dirigeants fatigués et avachis par des décennies de lutte ont refusé la relève combative et privilégié de se diluer dans les méandres sombres d’un système de gouvernance déliquescent…

Cette campagne aura montré la faiblesse des programmes proposés sur un domaine d’action dont dépend le pronostic vital de la Mauritanie : La lutte contre la gabegie…Rares sont les idées sérieuses présentées même s’il y en eu quelques unes timorées…Mais le plus inquiétant c’est cette persistance du candidat au pouvoir, que l’on dit presque assuré de sortir victorieux de cette élection, de se faire entourer par des champions du détournement des deniers publics et dont les richesses à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, sont une insulte à la morale, à la déontologie de gouvernance et aux lois qui régissent la République.

Enfin il est regrettable qu’au lendemain de cette élection et quel qu’en sera le vainqueur les mauritaniens soient pris dans l’engrenage du choix forcé entre un président sortant au bilan mitigé et qui ne convainc pas par ses choix des ressources humaines, par sa vision et sa rigueur d’une part et une possible irruption d’un battant et sang chaud d’autre part, qui à force de vouloir répondre aux besoins pressants de changements profonds, pourrait donner l’occasion rêvée aux pourfendeurs de la démocratie de nous ramener à la case départ.

Qu’Allah protège la Mauritanie.

Imam Cheikh.

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