Le quotidien de Nouakchott: La capitale mauritanienne, Nouakchott, traverse une crise de l’eau d’une extrême gravité.
Depuis plusieurs semaines, les habitants sont confrontés à une pénurie d’eau exacerbée par des spéculations sur les prix de l’eau vendue par les charretiers et les camions-citernes. Cette situation critique découle de plusieurs facteurs, notamment un manque de maintenance des infrastructures, des dysfonctionnements administratifs, et des phénomènes naturels aggravés par la saison des pluies.
Les origines de la crise : une combinaison de facteurs naturels et humains
La crise de l’eau à Nouakchott trouve ses origines dans plusieurs problèmes structurels et conjoncturels. Le fleuve Sénégal, qui alimente une grande partie de la ville en eau via le projet Aftout Essahli, est sujet à une forte sédimentation, particulièrement pendant la saison des pluies. Selon un responsable de la Société Nationale de l’Eau, le taux de sédimentation dans les eaux du fleuve a récemment atteint 2000 unités, ce qui a considérablement réduit la capacité des stations de traitement à purifier l’eau destinée à la consommation. Bien que ce taux ait depuis baissé à 1000 unités, la situation reste préoccupante, et la capitale ne retrouvera un approvisionnement normal que si de nouvelles pluies ne viennent pas aggraver le problème.
Les engagements du gouvernement : des promesses qui tardent à se concrétiser
On se rappelleque face aux pénuries précédentes, le Conseil des Ministres du 21 août 2023, présidé par Mohamed Ould Cheikh El-Ghazouani, avait annoncé des mesures pour remédier à la crise. Parmi celles-ci, l’entretien régulier des infrastructures hydrauliques, mais surtout la mise en service de nouvelles sources d’approvisionnement. Ainsi l’extension du champ captant d’Idini, et la construction d’une usine de dessalement à Nouakchott figuraient en tête des priorités. Cependant, la mise en œuvre de ces promesses se fait attendre, et la crise continue de s’aggraver, alimentée par une gestion défaillante et des intérêts particuliers.
Le projet Idini : une opportunité minée par la corruption
Le projet de renforcement de l’approvisionnement en eau à partir du champ captant d’Idini représentait un espoir pour sécuriser l’approvisionnement en eau de la capitale est aujourd’hui sérieusement compromis suite aux manœuvres dilatoires de certains fonctionnaires. Initialement attribué au groupement CGC INT/HIEICO, un consortium chinois, le marché a été annulé uniquement dans le but de favoriser une entreprise égyptienne, AMSC, en dépit de son élimination initiale pour non-conformité.
Les acteurs principaux de ce feuilleton qui met en danger l’approvisionnement futur de la capitale ne sont autre que Khadija Mint Bouka, présidente de l’Autorité de Régulation des Marchés Publics, et Moctar Ould Bouceif, nommé depuis ministre. Le rétablissement d’AMSC dans la course, malgré les justifications claires pour son élimination, met en péril la réalisation du projet et, par conséquent, la sécurité de l’approvisionnement en eau pour des millions de personnes. Il faut souligner que le partenaire de la société égyptienne est le même homme d’affaire qui avait été pris à partie par l’ex ministre de l’Hydraulique Ismail Abd El Vettah qui avait admonesté ses représentants faces à des travaux en retard. Le même ministre qui semblait prendre à bras le corps les problèmes du secteur a été inexplicablement débarqué et remplacé par Amal Mint Maouloud dont l’expérience était surtout dans le domaine de l’électricité et dont le nom a été évoqué dans le dossier controversé de l’éclairage public de Nouakchott.
Les répercussions pour la population : un quotidien marqué par la pénurie
Les répercussions de ces dysfonctionnements se font sentir dans toute la capitale, particulièrement dans les quartiers périphériques comme Toujounine, où certains habitants subissent des coupures d’eau depuis près de deux ans. En plein été, les habitants doivent faire la queue sous un soleil brûlant pour acheter de l’eau à des prix exorbitants. Le coût d’une barrique de 200 litres d’eau atteint parfois 700 à 1000 ouguiyas, un fardeau insupportable pour de nombreuses familles déjà précarisées.
Les habitants expriment leur frustration face à l’inaction des autorités, dénonçant une situation inacceptable pour une capitale moderne. « Nous sommes en plein 21ème siècle, et nous n’avons toujours pas un accès fiable à l’eau. Les autorités doivent prendre leurs responsabilités, » déclare Mohamed, un résident de Nouakchott.