Depuis la mise en application de loi sur l’éducation (Loi 2022-023 portant loi d’orientation du Système Éducatif National) dont les contours restent très ambigus, – une reforme éducative qui est contestée, aujourd’hui encore -, de nombreux parents mauritaniens ont trouvé comme alternative, la migration scolaire au Sénégal pour assurer à leurs enfants une bonne éducation.
Le phénomène n’est pas nouveau, des familles mauritaniennes dégoûtées par la léthargie que traverse notre système éducatif, choisissent d’envoyer leurs enfants au Sénégal pour leur garantir, l’accès à de meilleures écoles et une éducation de qualité.
Seulement, depuis la mise en application de la Loi d’orientation (l’école républicain), la pratique a explosé : le Sénégal est devenu la destination scolaire des parents nantis ou tout simplement, ceux avertis et désirant contourner les contraintes de la nouvelle Loi d’Orientation pour assurer à leurs enfants une bonne éducation. L’objectif étant de fuir le chaos scolaire et le désastreux éducatif créés par les pouvoirs successifs du pays, depuis l’indépendance, dans volonté hégémonique identitaire.
Désormais, le Sénégal, en plus, d’être l’une des destinations privilégiées pour de nombreux malades, en quête de meilleurs soins, ce pays voisin fait face à l’arrivée de vagues d’élèves et de familles – Dakar, Richard Toll, Saint-Louis-, Thiès, pour ne citer que ces villes, enregistre une forte présence de Mauritaniens, qui n’hésitent pas à louer des appartements ou maisons pour être aux côtés de leurs enfants pendant l’année scolaire.
Si certains ont de la famille sur place – un oncle, un cousin etc., d’autres n’ont pas cette chance. Cependant, ils peuvent compter sur leur porte-monnaie. L’argent semble ouvrir toutes les portes. Quant aux plus démunis, et les moins stratèges, ceux-là se résignent à envoyer leurs enfants à l’école publique, avec la garantie de leur ouvrir le boulevard de l’échec et même de l’incivisme.
Les parents qui ont décidé de traverser le fleuve ont compris que l’éducation n’a pas de prix. C’est un sacrifice, un investissement. C’est pourquoi, certains parents ne pouvant pas se déplacer envoient leurs enfants avec des « domestiques » attachés à la famille depuis longtemps, une manière de combler leur absence et reproduire l’atmosphère familiale du pays.
L’autre alternative, c’est la mère qui accepte de se déplacer pour être auprès de ses enfants au Sénégal pendant toute l’année scolaire. Le papa, généralement maintenu à Nouakchott pour des raisons professionnelles, sera obligé de faire des va-et-vient entre la Mauritanie et le Sénégal.
On a beau vanter l’école publique mauritanienne, la réalité est qu’elle est devenue le carrefour des plus déshérités de la république. Même si une poignée de personnes de la haute sphère sociale continue d’y croire. Cependant, elle prend toujours la précaution d’assurer derrière des cours à domicile à ses enfants. Des cours dispensés souvent par d’éminents professeurs, et ce dans toutes les disciplines. Ce sont ces rares enfants qui arrivent à s’extirper de la médiocrité ambiante de nos établissements publics ; faisant office d’arbre qui cache la forêt.
Cette migration scolaire n’est pas sans désagrément pour les familles. A-t-on pensé aux traumatismes, à la séparation, au coût et autres conséquences que crée cette situation, soit la conséquence des choix politiques néfastes et idéologiques à répétition de nos gouvernants ayant conduit à la mise à mort de notre système éducatif ? Quel est le sens de la souveraineté, si un pays est incapable d’assurer une bonne éducation à sa jeunesse ?
Si le Sénégal peut, pourquoi pas la Mauritanie. Tout est question de volonté politique. Il suffit de laisser s’exprimer notre identité naturelle dans notre environnement naturel, en y intégrant les contraintes de la mondialisation, la globalisation pour que s’impose l’école qui sied à la Mauritanie. Mais nous préférons continuer à persévérer dans notre entêtement, oscillant entre option idéologique et émotionnelle.
Seyré SIDIBE