La praxis politique en Mauritanie ressemble fort à la circulation routière du pays : un désordre indescriptible, un véritable capharnaüm. Cette anarchie qu’on peut observer dans les rues de Nouakchott est révélatrice de notre rapport à la loi, aux règles, aux symboles et partant à tout ce qui est institutionnel. Ainsi, le malaise qui touche actuellement les grands noms de l’histoire politique de notre pays est symptomatique de notre relation avec les « choses instituées ».
Une crise qui a fait « glisser », voire emporter plus d’un homme politique, parmi lesquels certains mammouths et ténors de la politique nationale vers des destinations incertaines pour servir la compromission.
Ces dérives inopportunes dans le contexte de l’élection présidentielle du 29 juin, réconfortent l’analyse d’un confrère et doyen, qui soutient en substance, que les partis politiques en Mauritanie sont le plus souvent créés, ex nihilo par un homme, et ne reposent sur aucune référence, assise théorique qui sous-tend un projet de société, des idéaux et des valeurs. C’est assurément l’une des raisons qui expliquent les transhumances politiques devenues de véritables « migrations politiques ».
Des pratiques qui ont atteint un pic sans précédent sous l’ère Ould Ghazouani. On n’aura tout vu. Au nom de l’apaisement politique tous les compromis, tous les deals, toutes sortes d’accords, d’arrangements et même de transactions contre nature ont été passés pour être admis dans le giron du pouvoir, et ce au détriment de la « doctrine factice » dont se revendiquent ces formations politiques.
S’il est communément admis que la politique est par essence opportunisme, jeu d’intérêts ; elle a tout de même besoin d’une once de vertu pour ne pas être monstrueuse. En effet, quel sens donné à la chose politique lorsqu’ elle est portée par des hommes sans crédibilité ?
Nos partis politiques sont donc de véritables quincailleries où l’on trouve tout et n’importe quoi. Exception faite pour certains. En vérité, la majorité de nos formations politiques ne s’identifie à aucune doctrine, ce qui rend problématique leur désignation ou caractérisation.
De véritables passe-partout, toujours à l’affût de tous les régimes, excellant dans l’art de la flagornerie, tout en faisant fi de la nature de ces pouvoirs : légitimes ou illégitimes, populaires ou impopulaires, démocratiques ou autocratiques etc.
Dans une démocratie normale, les partis politiques sont toujours nés autour d’une certaine philosophie, ils sont porteurs d’idées et de convictions. Ces identifiants déterminent et régulent la vie, les fréquentations et accointances de chaque formations politiques.
La scène politique est devenue la Cour du roi Petaud. Confuse et illisible. Pour la première fois des partis emblématiques et caractéristiques de l’opposition, dans l’histoire du pluralisme politique du pays – UFP, RFD, APP – sont au bord de l’implosion, au point que les observateurs se demandent : de quels bords politiques sont-ils désormais placés ?
Décidément, ce premier quinquennat du président Ould Ghazouani a fait du mal à la démocratie mauritanienne. On assiste à un big bang de l’édifice démocratique, en passe d’emporter les « Temples et Académies » de la démocratie du pays. Un effet destructeur qui va consolider le pouvoir en place, au détriment du pluralisme démocratique.
À quelque chose malheur est bon dit l’adage. L’opposition étant consubstantielle à la nature humaine et à la démocratie. Une autre alternative, d’autres alternatives est / sont née.s pour porter la voix et les aspirations d’une partie du peuple, qui attend et croit encore au changement.
Seyré SIDIBE