Le Panafricanisme dévoyé

Le Panafricanisme dévoyé

Le Panafricanisme, je connaissais déjà le concept que j’ai découvert sur les bancs du lycée – il y a une trentaine d’années -, à travers un cours initiation à la littérature Négro-africaine, et plus exactement sur ce qu’ on appelait une déclinaison littéraire du panafricanisme : la Négritude.

A cette époque-là, la culture n’est pas démocratique. Elle était élitiste soit l’apanage de ceux qui avaient l’audace d’ouvrir un livre pour le lire mais surtout le comprendre et en saisir la substance.
Ainsi, l’on échappait à la déferlante actuelle de la culture des mass-média caractérisée par une surabondance de l’information ayant pour corollaire l’émergence d’une nouvelle  » race d’intellectuels » qui s’improvisent en leaders, et qui croient tout savoir sur la base d’une culture de masse acquise sans effort et sans surpassement de soi.

Le Panafricanisme, ces dernières années on en parle tellement que je me suis demandé si le concept ne venait pas de naître. Il inonde aujourd’hui les réseaux sociaux, il est mis en relief dans les discours politiques, si bien que certains vont jusqu’en faire un mode de gouvernance.

Le Panafricanisme ne peut être porté par un féodal ou un esclavagiste

Selon Wikipedia  » Le panafricanisme est à la fois une vision sociale, économique, culturelle et politique d’émancipation des Africains et un mouvement qui vise à unifier les Africains du continent et de la diaspora africaine en une communauté africaine mondiale ».

Cette définition a le mérite d’être claire en ce sens qu’elle met l’accent sur l’UNITE, LA SOLIDARITE et l’ÉMANCIPATION des Africains et de la Diaspora au coeur de son projet sur fond de la recherche de la DIGNITÉ Africaine.

Que dire de ses origines ?

Le Panafricanisme est né dans les Caraïbes au XIXe siècle, dans le contexte du processus d’abolition de l’esclavage.

Dès lors, il est avant tout question de dignité Africaine et Noire du fait que ces derniers ont souffert de toutes les formes d’exploitation et de pratiques abominables : la traite négrière, la colonisation et le néocolonialisme etc.

Partant de ce qui précède, il est illusoire de voir un Africain qui lui-même afflige l’indignité à son semblable adhérer au panafricanisme. Ce serait rien de plus qu’ une trahison de cette cause noble et louable.

Dans quelle mesure peut-on réclamer à cor et à cri la libération du continent Africain et la DIGNITÉ de l’homme Africain alors qu’ on pose les mêmes actes que l’impérialiste étranger ?

Ce panafricanisme par hypocrisie ou par manque de consistance et de coherence est le début de l’errance et du dévoiement du Panafricanisme.
Cette nouvelle clientèle qui entend porter la lutte si noble des pères fondateurs du Panafricanisme est fondamentalement nuisible et compromettante voire encombrante pour défendre les idéaux du Panafricanisme.

Elle porte la trahison et la compromission comme étendard en hypothèquant le vrai panafricanisme qui est avant tout basé sur la promotion de la DIGNITÉ de l’homme Noir, la véritable fraternité Africaine qui suppose qu’un Africain ne peut réduire en esclavage un autre ou même le considérer comme tel.

Portrait croisé : féodal et impérialiste étranger

ine fine, le féodal qui prétend être panafricaniste alors qu’ il se glorifie d’être propriétaire d’esclaves parmi ses » frères Noirs  » qu’il considère comme des sous hommes, impurs et issus de la mauvaise graine est pire que l’envahisseur étranger.

L’impérialisme porte le même visage qu’il soit étranger, Blanc, Arabe ou Noirs, il est suprématiste , il exploite à merci les dominés réduits au statut de sujets et de « non personne » et perpétue la même culture hégémonique et raciste.

L’impérialiste étranger tout comme l’impérialiste local est attaché à une idée de grandeur et de noblesse qui lui donne le droit d’exploiter, d’humilier en établissant une échelle des valeurs qui le place au sommet : la référence en toute chose.

D’ailleurs, la raison et la justesse se trouvent du côté de l’impérialiste étranger qui vient chasser, prouver sa noblesse et sa grandeur sur d’autres terres pour agrandir son espace vital, son pouvoir et à la recherche de l’exotisme etc.

Comme dit l’adage, c’est l’hôpital qui se moque de la charité. Peu importe la couleur de la main qui m’inflige une gifle sur la joue – Blanche ou Noire – , moi je ressens la même douleur.
Et D’ailleurs, la forfaiture fait plus mal lorsqu’ elle vient de l’intérieur, de « nous-mêmes ».

Le Panafricanisme n’est pas la haine de la France ou de l’Occident

A tous les panafricanistes, le vrai panafricanisme n’est pas porteur de haine. Il n’est pas revanchard mais s’évertue à stimuler le décollage et le delic de l’Africain par des valeurs qui le libère lui-même en vue de se libérer de la domination étrangère.

Le Panafricanisme c’est pour moi, une disposition d’esprit à accepter son frère Africain. Ce qui se traduit par le respect mutuel, la considération et la volonté de coopération et de solidarité intra-africain.

Le Panafricanisme ne peut être la négation de l’Africain par l’Africain. L’humiliation du Noir par le Noir.
A contrario, le Noir doit être le remède du Noir et même son rédempteur.
Le combat du panafricanisme n’est pas populiste. Il ne peut tomber dans la bassesse : l’injure, les insanités ou encore des slogans du type mort à la France.

Dans cette optique, le panafricanisme tombe dans la facilité en laissant de côté son objet : l’homme Noir ou Africain.
Chercher d’abord à assainir la culture Africaine qui a besoin d’être dépoussiérée de plusieurs tares sociales : orgueil, esclavage intra-africain, féodalité, esprit de caste etc.

Que nos panafricanistes eux-mêmes réussissent à s’émanciper de ces fléaux en changeant de cible et d’ennemis. Notre mal, c’est nous-mêmes, c’est notre incapacité à nous entendre, à nous accepter, à nous honorer mais surtout à nous RESPECTER .

En définitive, je suis pour un panafricanisme respectueux des Africains entre eux. Un Panafricanisme qui combat le verbe être  » Je suis » trop exubérant, vaniteux et égoïste pour lui substituer le  » Nous sommes » plus rassembleur et plus humble capable d’aller défendre la dignité et l’émancipation de l’homme Noir après avoir lui-même balayé devant sa propre cour.

Seyré SIDIBE

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