J’ai partagé mes réflexions avec certains des collaborateurs proches de Biram Dah Abeid : il n’incarne plus l’opposition radicale. Ce constat est partagé, notamment depuis les élections de 2019.
Les quelques postes octroyés ou promis à ses partisans et proches dans des organismes tels que Taazour, ainsi que dans le domaine des droits humains, indiquent un éloignement de l’opposition radicale.
En réalité, celle-ci vise généralement des changements rapides et significatifs dans le système ou la société, avec pour objectifs le renversement par les urnes du régime en place, une transformation sociale radicale, la défense des droits et des libertés, ainsi que la dénonciation des systèmes de domination, dans le but de créer une société plus juste et équitable.
Toutefois, la récente reconnaissance de Biram Dah Abeid parlant d’une amitié avec le chef de l’État a été perçue comme un coup dur pour lui ; également interprétée comme un manque de culture politique.
Par ailleurs, il est nécessaire d’avoir des moyens financiers pour mener une campagne électorale. Cette année, les soutiens financiers ne semblent pas être en sa faveur. L’idée même d’une insurrection pour renverser le régime en cas de besoin n’est plus d’actualité. Bien que cela n’ait pas été explicitement demandé pendant le mandat de l’ancien chef de l’Etat A. Aziz, la situation politique le laissait entendre.
De plus, une confrontation indirecte et disproportionnée, combinée à un manque de transparence, a nui à son image et entache toujours sa crédibilité. Il semblerait que certains propriétaires d’hôtels qui avaient mis gratuitement leurs établissements à disposition, ainsi que des militants associatifs de la diaspora, etc., ont exprimé leur mécontentement. Son manque de reconnaissance et de considération envers certains acteurs risque de limiter ses chances de réussite.
Biram Dah Abeid a parcouru le pays à la tête de l’IRA, mouvement abolitionniste dont il doit maintenant se retirer pour garantir la continuité du financement, une chose qui a été promue mais malheureusement non respectée. Même s’il continue à se présenter comme le candidat du RAG et à mettre en avant son parcours militant malgré la perte de ses principaux collaborateurs, cela ne sera pas suffisant pour remporter des élections.
En analysant les élections législatives précédentes, il est clair que Biram Dah Abeid a perdu de son influence. Sa crédibilité en a souffert. La coalition Espoir a remporté son bastion de Ryad. Les faibles résultats en termes de députés, maires et conseillers municipaux pour une opposition le confirment. Les Mauritaniens ont différents points vue sur le vote. Le vote pour Biram ou pour son candidat n’a pas été au point.
Il est judicieux de lui conseiller, en premier lieu, de comprendre que son absence lors d’une élection n’est pas une insulte personnelle. Ensuite, il devrait annoncer publiquement qu’il ne se présentera pas en 2024, et appeler à une candidature unique. Si cette candidature unique parvient au second tour, il devrait encourager toutes les forces politiques à se rallier à cette cause, en s’y incluant lui-même, non pas en tant que leader mais en tant que membre de la classe politique.
Bien que certains puissent penser que cela est improbable étant donné son tempérament et sa personnalité, il est important de noter que cette dernière carte en main n’est pas son atout principal. En effet, s’il échoue, cela ne sera pas uniquement de sa faute. Il pourrait alors passer le relais jusqu’en 2029. Les élections approchent à grands pas, et il n’a plus rien à prouver.
En 2029, après un retrait bénéfique de la course à l’élection présidentielle un retour honorifique sera possible en proposant un programme axé sur l’économie, l’éducation, la santé, l’environnement, la sécurité, le social, la justice, la culture et l’identité plurielle de la Mauritanie, Biram Dah Abeid pourrait envisager une sortie en beauté. Il devrait également tenir compte des spécificités régionales, des défis nationaux et des tendances politiques du moment.
Souleymane Sidibé